SOUFISME AU MAROC

                         



Le Soufisme comme Axe Central de l'Identité Marocaine

       Le soufisme représente la dimension intérieure et spirituelle de l'islam, une quête mystique qui vise à la purification de l'âme et à l'élévation vers la connaissance divine par la voie de l'amour et de la sagesse. Contrairement aux perceptions occidentales réductrices, le soufisme ne se définit pas comme une secte, mais plutôt comme une voie (tariqa) qui s'inscrit au cœur de l'orthodoxie sunnite, en particulier dans le contexte malikite marocain. Son ancrage historique et spirituel puise directement dans la tradition prophétique, plaçant l'amour du Prophète Mohammed et l'imitation de son éthique au centre de sa pratique.  

        Au Maroc, le soufisme n'est pas un phénomène marginal, mais un pilier fondamental de la structure religieuse, culturelle et politique du pays. Son influence se manifeste à travers une relation complexe et co-constructive avec trois acteurs majeurs du paysage national : la monarchie, les mouvements islamistes et les confréries soufies elles-mêmes. La monarchie marocaine, en particulier, fonde une part essentielle de sa légitimité sur son statut de chef religieux , une légitimité à la fois concurrencée et renforcée par la présence de ces mouvements.  

        Les origines historiques et les figures fondatrices

       Le Maroc est un carrefour stratégique entre l'Orient et l'Occident, un espace qui a favorisé le développement d'une civilisation riche et marquée par une profonde spiritualité. Le soufisme y a pris racine très tôt, avec des figures emblématiques qui ont façonné les premières voies initiatiques. Parmi les pionniers, Sidi Ali Ibn Hirzihim et son disciple Abu Madyan occupent une place de choix. Abu Madyan, en particulier, est considéré comme l'un des saints les plus influents du Maghreb, son héritage spirituel rayonnant jusqu'au Proche-Orient.  

       Au fil des siècles, le soufisme s'est enrichi de l'apport de grands maîtres, dont le Bagdadien Abdelkader Eljilani, souvent cité comme un précurseur des soufis dans le monde entier et dont la Tariqa Qadiriyya est une des plus importantes au monde. Plus tard, au 18ème siècle, Fès est devenue le berceau d'une nouvelle confrérie, la Tariqa Tijaniya, fondée par l'Algérien Ahmed al-Tijani. Le mausolée de ce saint, situé à Fès, est aujourd'hui un lieu de pèlerinage majeur pour des millions d'adeptes venus de toute l'Afrique et du reste du monde.  

 Les Zaouïas, centres spirituels et sociaux

        Le développement du soufisme au Maroc est indissociable de celui des zaouïas, ces lieux saints qui servent de centres spirituels, de lieux de pèlerinage et de sanctuaires. Avant l'indépendance, ces zaouïas jouaient un rôle crucial non seulement dans la vie religieuse, mais aussi dans la vie sociale et politique du pays. Elles fonctionnaient comme des centres d'éducation et de rassemblement, exerçant une influence significative sur les communautés et même sur des tribus entières, comme la Derkaouia Zaouia qui gouvernait de puissantes tribus dans le sud du Maroc. Le terme   Makhzen, qui désigne la structure politico-administrative du pouvoir marocain, trouve ses origines dans le mot arabe pour « entrepôt », illustrant comment l'autorité centrale s'est historiquement construite en collectant les richesses et en cooptant ces réseaux traditionnels.  

        Après l'indépendance, les zaouïas se sont adaptées aux transformations de la société tout en continuant de maintenir les pratiques, les rituels et les enseignements traditionnels. Elles contribuent à préserver un patrimoine immatériel et à promouvoir la cohabitation et la tolérance entre les différentes religions et communautés. Cette présence est particulièrement forte dans les campagnes marocaines, où l'attachement au soufisme demeure très solide en raison du grand nombre de sanctuaires.  

 Principes doctrinaux : amour, purification et pacifisme

         La voie soufie est fondamentalement axée sur l'amour de Dieu ('Ishq) et la purification de l'âme (nafs). Elle se distingue par une approche spirituelle qui prône le détachement des plaisirs de la vie d'ici-bas et la consécration à l'adoration. La méditation, la récitation des noms divins (  dhikr), et l'humilité sont des pratiques centrales pour exprimer la bonne foi et la sincérité du dévot. Le soufi cherche un guide spirituel ( shaykh) qui l'accompagne sur le chemin de la sagesse et de la vérité. Le pacifisme est une facette essentielle du soufisme depuis sa genèse. Cette orientation non-violente et centrée sur la purification intérieure a fait du soufisme un allié naturel de la monarchie marocaine face à des mouvements plus politisés ou extrémistes. 

  


 Les Grandes Confréries : Acteurs Clés du Paysage Soufi

    Le Maroc abrite une mosaïque de confréries soufies, chacune avec ses spécificités, ses rituels et ses figures emblématiques. Deux d'entre elles se distinguent par leur influence, à la fois nationale et internationale.  

 La Tariqa Qadiriyya Boutchichiya

       La Tariqa Boutchichiya est une branche de la Qadiriyya, un ordre soufi fondé au 12ème siècle par le cheikh Abdul Qadir Gilani de Bagdad. Le mouvement s'est enraciné au Maroc au 18ème siècle, devenant l'une des plus grandes confréries du pays, avec son siège principal dans le village de Madagh, près de Berkane. La Boutchichiya joue un rôle prépondérant dans le paysage politique marocain grâce à son alliance avec la monarchie alaouite.  

      L'ordre met l'accent sur plusieurs pratiques spirituelles fondamentales, telles que le dhikr (répétition des noms divins) et l'importance d'une relation étroite entre le maître spirituel (shaykh) et le disciple (murid). Les disciples s'engagent dans un parcours d'élévation spirituelle pour s'élever au-dessus de leur ego, par l'invocation, l'amour et la compagnie du maître.  

       Malgré son influence, le mouvement fait face à des défis internes, notamment la question de la succession de ses guides charismatiques. La mort de Cheikh Jamal Eddine a engendré des tensions sur l'avenir de la direction, soulignant la complexité de la transmission du leadership dans ces structures spirituelles. La capacité de l'ordre à se réinventer institutionnellement, en passant d'une autorité basée sur une figure unique à une direction collective, sera un test pour l'avenir de son influence.


 

 La Tariqa Tijaniya

       La Tijaniya, fondée par Ahmed al-Tijani à Fès à la fin du 18ème siècle, est une autre confrérie majeure d'origine marocaine. Elle se distingue par son caractère particulièrement prosélyte et son implantation massive en Afrique de l'Ouest et au Soudan. Ses pratiques sont centrées sur des litanies spécifiques, le  wird ou Lazim, qui incluent des répétitions de la Shahada et de la Salat al-Fatih, en plus des cinq piliers de l'islam. La voie Tijaniya met l'accent sur la purification du cœur et l'adhésion aux enseignements du Coran et de la Sunna.  

      Le mausolée de Cheikh Ahmed al-Tijani à Fès est un lieu de pèlerinage pour des millions d'adeptes à travers le monde. Cette centralité spirituelle fait du Maroc un centre de l'islam pour de nombreux pays d'Afrique, une position que la monarchie s'efforce de capitaliser.


 

 Autres confréries et diversité du soufisme marocain

       La richesse du soufisme marocain ne se limite pas aux grandes Tariqas institutionnalisées. Le pays est une véritable mosaïque de confréries, comme la Sqalliya, la Sharqawiya, la Wazzaniya ou les Gnaoua. Cette diversité témoigne de l'attachement profond des Marocains à une spiritualité équilibrée et pacifique, qui rejette l'excès et le fanatisme. Le soufisme marocain est un « mélange de soufisme et de maraboutisme », une tradition qui a su s'adapter aux spécificités culturelles et aux réalités locales.  

 Soufisme et Makhzen : La Co-construction d'un Modèle Religieux

 La légitimité religieuse du monarque

     La Constitution marocaine consacre le titre du roi comme Amir al-Mu'minin (Commandeur des Croyants), lui conférant la responsabilité de veiller sur le respect de l'islam et de garantir la liberté de culte. Cette légitimité n'est pas monolithique, elle repose sur une triple assise :  

  • Scripturaire : le monarque est le chef (imâm) de la communauté (Umma), chargé de la guider et de protéger l'espace de la loi divine (Dar-al-Islam).  

  • Contractuelle : elle s'articule autour de la notion de contrat d'allégeance (bay'a) entre le monarque et son peuple.  

  • Historique : elle se fonde sur une double historicité, dynastique (la lignée chérifienne des Alaouites) et mystique, qui remonte à la descendance du Prophète Mohammed.  

      La monarchie marocaine, et en particulier le règne de Hassan II, a cherché à consolider ce capital symbolique en anticipant l'émergence de mouvements islamiques. Dès le début des années 1980, le pouvoir a cherché à réglementer l'utilisation de l'islam dans l'espace public pour lutter contre les "hétérodoxies" et les "charlatans".  

 Stratégie de cooptation et d'encadrement des Zaouïas

       Le Makhzen a développé une stratégie sophistiquée d'encadrement des élites politiques et religieuses, en alliant cooptation et répression sélective. Cette approche se manifeste de manière particulière envers les mouvements islamiques. Une tolérance inhabituelle est observée envers des mouvements non-reconnus comme Al Adl Wal Ihsane, malgré leur refus de reconnaître la légitimité religieuse du monarque. Cette tolérance s'explique par le fait que le régime parie sur une cooptation progressive de ces groupes, tant qu'ils respectent les "trois non" : le refus de la violence, de la clandestinité et de la coopération avec des forces étrangères.  

       Inversement, les confréries soufies qui n'ont pas de projet politique concurrent sont activement soutenues et intégrées dans les rouages officiels. La nomination d'un disciple de la confrérie Boutchichiya à la tête du ministère des Affaires religieuses est un exemple frappant de cette alliance. Cette politique de soutien et d'encadrement renforce l'idée que le soufisme sert d'espace d'investissement pour le pouvoir royal, un "capital symbolique" échangeable qui contribue à la stabilité du régime.  

 Le soufisme comme rempart idéologique

       Le soufisme est promu par l'État comme un modèle d'islam flexible, tolérant, ouvert et non politisé, une arme idéologique pour contrer l'extrémisme salafiste et wahhabite. Ce discours, renforcé après les attentats de Casablanca en 2003, présente le soufisme comme une "chevalerie spirituelle" qui s'oppose à la rigueur simpliste et potentiellement violente des interprétations littéralistes de l'islam. Le pouvoir marocain cherche à "conduire la conduite religieuse" de ses citoyens en faisant du soufisme un modèle pour un islam compatible avec la modernisation de l'État et la cohésion sociale.  

 Le Soufisme face à l'Islam Politique : Un Champ de Bataille Religieux

       Le paysage religieux et politique du Maroc est marqué par la coexistence de plusieurs acteurs islamiques aux stratégies distinctes. L'analyse de ces dynamiques révèle une gestion fine par le Makhzen qui préfère la division et la fragmentation du pouvoir à une hégémonie potentiellement menaçante.

 Le Parti de la Justice et du Développement (PJD) : le modèle participatif

        Le PJD est un parti islamiste légaliste qui a choisi de s'intégrer dans le jeu politique national. Il a obtenu un statut de force politique majeure, remportant les élections législatives de 2011 et de 2016, et a dirigé le gouvernement pendant dix ans. Sa stratégie de "participationnisme" repose sur la reconnaissance de la légitimité historique et religieuse du roi, qu'il voit comme l'arbitre et le protecteur de l'islam dans le pays. Cependant, cette intégration a contraint le PJD à faire des compromis sur des "lignes rouges" idéologiques, comme la légalisation du cannabis thérapeutique ou la promotion de la langue française dans l'éducation, ce qui a été perçu comme une perte de pouvoir face au Palais.  

Le mouvement Al Adl Wal Ihsane (Justice et Bienfaisance) : l'opposition frontale

       Contrairement au PJD, Al Adl Wal Ihsane rejette frontalement le système politique marocain et, surtout, la légitimité du monarque en tant qu'Amir al-Mu'minin. Le mouvement, fondé par Abdessalam Yassine, aspire à l'instauration d'un califat, tout en se défendant de recourir à la violence. Sa stratégie de non-participation aux élections, basée sur l'attente d'un "grand soir" et sur un récit de rêves mobilisateur, l'a maintenu dans un isolement politique. Bien que toléré, il n'est pas légalement reconnu et ses dirigeants ont fait l'objet de mesures répressives, maintenant le mouvement dans une position de confinement.  

 Le KO électoral de 2021 : la victoire d'une stratégie de réalignement

      La défaite écrasante du PJD lors des élections de 2021, le faisant passer de 125 à seulement 13 sièges, a marqué un tournant majeur. Le résultat a été la victoire de partis perçus comme proches du Palais, tels que le RNI et le PAM.  

      Cette débâcle n'était pas un simple accident électoral, mais la conséquence d'une combinaison de facteurs, dont le plus déterminant fut la réforme du quotient électoral. Au lieu d'être calculé sur la base des votes exprimés, le quotient est désormais basé sur le nombre d'inscrits sur les listes électorales, une mesure qui favorise la dispersion des voix et la fragmentation de la représentation parlementaire. Le PJD fut le seul parti à s'opposer fermement à cette réforme, la considérant comme une manœuvre pour le priver de sa force électorale.  

       Cette manœuvre institutionnelle a brisé l'hégémonie du PJD sur son électorat, un parti qui, malgré sa loyauté affichée, représentait une force trop puissante pour le régime. En effet, la monarchie marocaine a historiquement privilégié la "balkanisation" du champ politique pour maintenir son contrôle et éviter qu'un parti unique ne domine les autres. La déroute du PJD, un parti islamiste modéré et légaliste, a permis au Royaume de se présenter comme un modèle où l'islamisme politique est non seulement géré, mais également réduit à une expression symbolique, sans empiéter sur le pouvoir réel du   Makhzen.  

CaractéristiqueParti de la Justice et du Développement (PJD)Al Adl Wal IhsaneConfréries Soufies (ex: Boutchichiya)
Statut Légal

Légal, participe aux élections.  

Non reconnu, mais toléré.  

Non reconnues comme partis, mais soutenues par l'État.  

Position vis-à-vis du Roi

Reconnaît la légitimité d'Amir al-Mu'minin et le rôle d'arbitre.  

Rejette le titre d'Amir al-Mu'minin et prône un califat.  

Alliées du Palais, le Roi loue leur rôle.  

Stratégie Politique

"Participationniste" : cherche à s'intégrer dans les institutions.  

"Révolutionnaire" : rejette le système pour un "grand soir".  

Ap-olitique : concentré sur la purification spirituelle et sociale.  

Projet Sociétal

Islamisation par les lois et la moralisation de la vie publique.  

Établissement d'un État islamique appliquant la charia par l'éducation.  

Éducation morale, cohésion sociale, pacifique, en dehors de la sphère politique officielle.  

 Le Soufisme, Outil de "Soft Power" et Réponse à l'Extrémisme

 La politique religieuse proactive post-2003

          Après les attentats de Casablanca en 2003, le Maroc a lancé une stratégie multidimensionnelle de lutte contre le terrorisme, incluant une réforme en profondeur du champ religieux. L'objectif principal de cette politique de "sécurité spirituelle" est d'encadrer la pratique religieuse pour qu'elle s'aligne sur les objectifs de l'État. L'État promeut activement le soufisme comme un modèle d'islam flexible, ouvert et non politisé, une alternative crédible aux interprétations rigides et littéralistes. L'ingénierie religieuse mise en place se manifeste par la nomination de figures soufies à des postes clés, comme un disciple de la confrérie Boutchichiya à la tête du ministère des Affaires religieuses.  

 Le Soufisme comme vecteur de tolérance et de paix

       Le soufisme est présenté comme un contre-modèle à l'islamisme radical. Le discours officiel, soutenu par l'organisation de festivals internationaux de musique soufie et de rencontres sur la culture soufie, met en lumière son caractère pacifique, son sens de la tolérance et son ouverture au dialogue interreligieux. Ces événements ne sont pas de simples manifestations culturelles ; ils servent de vitrine pour le modèle marocain de l'islam, qui promeut les valeurs de l'amour, de la paix et de la cohabitation.  

     La dimension géopolitique et l'influence en Afrique

       La promotion du soufisme par la monarchie marocaine n'est pas uniquement une politique intérieure, elle est également une stratégie de "soft power" visant à asseoir son leadership régional en Afrique. La diplomatie religieuse s'appuie sur le patrimoine commun de l'islam malikite et du soufisme confrérique pour renforcer les liens avec l'Afrique subsaharienne.  

        La Tariqa Tijaniya, avec son influence massive et ses millions d'adeptes en Afrique de l'Ouest, est un pilier de cette stratégie. Des hauts responsables marocains, dont le ministre des Affaires islamiques, mettent en avant le rôle de cette confrérie dans la consolidation des relations spirituelles et civilisationnelles entre le Maroc et des pays comme le Sénégal. En plus de ces liens historiques, le roi Mohammed VI a institutionnalisé des visites annuelles en Afrique et mis en place des programmes de formation d'imams africains au Maroc, exportant ainsi un modèle d'islam modéré et contrôlé.  

       Cette stratégie permet à la monarchie de se positionner comme un garant de la stabilité religieuse et un acteur clé dans la lutte contre l'extrémisme en Afrique, tout en servant ses intérêts économiques et politiques, notamment dans un contexte de tensions avec des pays voisins comme l'Algérie. Le soufisme, en tant que ressource diplomatique et culturelle, se transforme ainsi en un investissement politique et économique de premier plan.  

 Rôle et Résonance du Soufisme dans la Société Contemporaine

 Le soufisme dans les arts et la culture

       Le soufisme marocain est profondément ancré dans le tissu culturel du pays. Ses principes de contemplation et d'amour divin s'expriment à travers la musique, la poésie, la danse et la calligraphie. Les chants spirituels (samaa) sont une source d'inspiration pour de nombreux artistes, des musiciens traditionnels Gnaoua aux artistes urbains contemporains comme le rappeur français Abd al Malik. Cette dimension artistique et esthétique du soufisme offre une alternative aux idéologies qui cherchent à "déculturer" la religion.  

 L'attrait du soufisme auprès de la jeunesse et de la diaspora

       Le soufisme attire de plus en plus de jeunes Marocains et de membres de la diaspora, ainsi que des convertis, notamment en Europe et en Amérique du Nord. Cet attrait s'explique par sa capacité à offrir une spiritualité qui embrasse la modernité, rejette le fanatisme et apporte des réponses à une quête de sens dans un monde agité. Des professionnels et des intellectuels se tournent vers le soufisme, y trouvant une voie de développement personnel et moral. Le soufisme est perçu comme une tradition vivante et une "politesse du cœur" adab) qui guide les interactions humaines et offre un sentiment d'appartenance.  

 Défis et Perspectives d'Avenir

      Le soufisme au Maroc est un phénomène aux multiples facettes. Il s'agit d'une tradition spirituelle séculaire, un pilier historique de la cohésion sociale, un instrument de légitimation politique pour la monarchie et un outil stratégique de soft power sur la scène internationale. Son caractère pacifique et sa capacité à s'adapter en font un contre-modèle puissant face aux idéologies extrémistes.

      Cependant, cette position centrale n'est pas sans défis. Les confréries soufies sont confrontées à des enjeux de succession qui peuvent entraîner des divisions internes. L'alliance étroite avec le pouvoir royal, bien que protectrice, pourrait également menacer leur crédibilité et les faire percevoir comme de simples instruments du   Makhzen. La capacité du soufisme à se renouveler institutionnellement et à maintenir son authenticité face à ces pressions sera déterminante pour son avenir. 

      Malgré ces obstacles, le soufisme continue de jouer un rôle essentiel dans la résilience de la société marocaine. Son attrait croissant auprès de la jeunesse, sa richesse culturelle et son message de tolérance témoignent de sa pertinence durable. En maintenant cet équilibre délicat entre son rôle de tradition mystique et sa fonction d'outil étatique, le soufisme marocain continuera probablement d'être une force de stabilisation et d'influence, à la fois pour le royaume et au-delà de ses frontières.

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